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LE GENDRE DES CÉSARS

Vecchia, avec la complaisance de Murat, lui‑même plein d’amertume contre l’empereur et qui soutient la cause du « frère persécuté ». Louis s’enfuit d’Amsterdam, plante là sa femme et son trône. C’est la fin pitoyable d’une longue querelle où Napoléon a eu de la patience, où les torts ne sont pas de son côté. Louis, son préféré de toujours, qu’il appelle « presque son fils », qu’il a jadis, à Valence, élevé sur sa solde, avec qui il partageait son pain, n’a que l’excuse d’ « une lymphe âcre et viciée ». C’est un hypocondriaque, un malade, un malheureux qui fait le malheur des autres, d’Hortense surtout. Ainsi Napoléon n’a trouvé personne à ses côtés pour le comprendre ni pour le servir. À force d’énergie et de combinaisons, il se maintient et il maintient tout son monde avec lui à des hauteurs incroyables, vertigineuses. Ses frères jouent avec tout cela comme si tout cela était éternel. Le plus amer pour l’empereur n’est pas de sentir qu’on est ingrat. C’est de s’apercevoir qu’on est bête.

Louis a été mis en Hollande à un poste de douane, conformément au « système ». La raison d’être de sa royauté, c’est de veiller à l’application stricte du blocus dans un pays de commerce qui est une des grandes portes de l’Europe. Et cette royauté, comme le reste, ne peut durer que si l’Angleterre est vaincue par le blocus. Louis, qui n’y comprend rien, s’est laissé circonvenir par ses sujets. Il a fermé les yeux à la contrebande, il l’a protégée, et l’empereur, las de le rappeler à son devoir, de lui adresser des remontrances et des sommations, a dû agir, mettre des douaniers français dans les ports, puis protéger ces douaniers par des soldats. À la fin, il s’est trouvé dans la nécessité d’occuper militairement une partie des États qu’il a donnés en fief à son frère, et les gouverneurs de Bréda et de Berg-op-Zoom, d’ordre de Louis, ont fermé les portes de ces places à l’armée impériale. Voilà les Bonaparte couronnés presque en état de guerre, tandis que