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LE GENDRE DES CÉSARS

fastes du mariage de Louis XVI, à cette bénédiction nuptiale entourée de toute la pompe monarchique, bien qu’il y manque, à la grande colère de Napoléon, treize des cardinaux qu’il a réunis à Paris et dont l’absence évoque l’excommunication. Une autre image du sacre, cette messe du 2 avril 1810 dans le salon carré du Louvre, où officie encore l’oncle Fesch. Pendant le déjeuner, Metternich se montre à la fenêtre et crie à la foule, en levant son verre : « Au roi de Rome ! » On aura donc vu tous les miracles ! L’empereur d’Autriche a déjà renoncé au Saint‑Empire. Il abandonne encore à la France le vieux titre des futurs Césars germaniques, celui de roi des Romains.

Ce Paris qui se presse pour voir Napoléon et Marie‑Louise dans leur carrosse de cristal, c’est le même qui avait applaudi à l’exécution de Marie‑Antoinette. Que sont les opinions ? Des vêtements de rechange. Comme l’a dit, en diplomate flatteur, le comte Tolstoï au moment où l’on croyait encore au mariage russe, l’impossible, en ce siècle, est souvent ce qu’il y a de plus vraisemblable. Le mot s’applique encore mieux au mariage autrichien. Les hommes acceptent toutes les idées tour à tour, et toutes les métamorphoses. Combien de personnages Napoléon lui‑même n’a‑t‑il pas déjà faits, sans compter ceux qu’il lui reste à faire encore ? Il y a en lui un philosophe amer qui connaît l’inconstance des foules, égale à celle des choses. « Comme il eût été taxé de folie, celui qui eût osé prédire alors tout ce que l’on a vu depuis ! » Et l’on redira toujours que c’est la plus belle époque du règne, parce que la France croit que, cette fois, c’en est bien fini des guerres, oubliant celle qui continue avec Albion. Cette Autrichienne‑là, elle est populaire parce qu’elle semble « un gage de paix ». Alors Bonaparte, assis sur le trône de Louis XVI, semble l’avoir relevé. C’est le moment où on le voit, où il se sent le plus monarchique. Non qu’il oublie d’où il sort,