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NAPOLÉON

qui l’avait séduit jadis chez Joséphine, le port, la marche, l’inimitable simplicité d’une princesse, « la première princesse du monde », toute dressée à son rôle d’impératrice par l’éducation de la Hofburg, si parfaite en tout qu’elle ne manquera pas de donner un fils au mari que la politique lui a choisi et un héritier à l’Empire sur lequel elle vient régner. Pour le cadet-gentilhomme, c’est un peu le rêve du pauvre Mesmour dans les bras de la sultane, un rêve de plus d’une nuit, mais non pas d’un si grand nombre de nuits. Et il plaît à voir lorsque, passant, dans sa galante impatience, par-dessus le cérémonial et l’étiquette, il court sur la route de Soissons au‑devant de sa femme, entre dans sa voiture, l’enlève à la hussarde. Il plaît encore, mari amoureux et qui, pour cette jeune femme, veut un jour savoir danser.

Il voit surtout les grands aspects de ce mariage, non seulement la promesse d’un successeur, mais l’accomplissement de sa pensée constante, l’Europe unie, le continent fédéré. Ce qui se noue avec l’Autriche, moins le mot, c’est une alliance. Les fêtes du mariage sont déjà presque un autre Tilsit. Français et Autrichiens fraternisent, leurs drapeaux se mêlent, les soldats qui se sont battus à Wagram choquent leurs verres. Berthier, venu à Vienne pour conclure le mariage par procuration, a été reçu avec un empressement particulier par les militaires, lui‑même apportant à l’archiduc Charles, l’adversaire de tant de rencontres, la croix de la Légion d’honneur, celle que porte l’empereur, la croix du soldat, la même que, devant le radeau du Niémen, Napoléon avait donnée de ses mains au plus brave des grenadiers d’Alexandre. À Vienne, tout est pour la France, comme tout pour l’Autriche à Paris. Mêmes effusions, mêmes gestes, même théâtre qu’à Erfurt. L’enthousiasme, Metternich le joue admirablement. C’est lui qui représente l’empereur François aux cérémonies et aux fêtes qui répètent les