Page:Jacques Bainville - Napoléon.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
166
NAPOLÉON

telle que, le soir du 19 brumaire, on n’avait pas trouvé « de quoi expédier des courriers aux armées et aux grandes villes pour les informer de l’événement ». Il fallut, pour passer les premiers jours, emprunter des fonds aux banquiers, qui d’ailleurs trouvèrent que ce gouvernement provisoire n’était bon que pour un crédit limité et ne fournirent d’avances qu’à la condition que l’emprunt forcé serait aboli. On ne pouvait se contenter de ces expédients. En un mot, les finances étaient à reconstituer, comme le reste de l’État, car le Directoire était arrivé au dernier degré de l’insolvabilité. Bonaparte eut recours à un homme de la profession, nous dirions aujourd’hui un technicien. Il s’appelait Gaudin et c’était encore un fonctionnaire de l’ancien régime dont les débuts dans l’administration remontaient à la dernière année du règne de Louis XV.

Nous qui avons vu de nos yeux comment on passe de la panique à la confiance, nous sommes moins étonnés du redressement financier qui s’accomplit sous le premier Consul. Sa part fut de rassurer les intérêts, de mettre fin au « sauve-qui-peut ». Ce fut aussi d’écouter les hommes du métier qui lui recommandèrent de créer la Banque de France et de revenir aux taxes indirectes qu’avait supprimées la Révolution. On avait salué avec enthousiasme la fin des aides et de la gabelle. On retrouva les « droits réunis » c’est‑à‑dire les mêmes choses sous d’autres noms. Mais l’important était de donner des ressources au Trésor pour continuer les grandes entreprises extérieures. Et l’ordre rétabli dans les finances, la monnaie saine, le paiement exact des rentes, ce furent encore des bienfaits du Consulat.

L’ordre, il fallait le rétablir partout. Dix ans de Révolution, et des années où toute l’administration avait été élective, avaient laissé un gâchis moral et matériel affreux. Tout était à refaire, depuis la justice jusqu’à la voirie. L’étonnant était que l’on