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Comme Robespierre frappera les « exagérés », il noya dans le sang ses « adorables » compagnies et ainsi retrouva son empire sur ce qui en restait.

Il a de nouveau son instrument en main pour poursuivre sa carrière apocalyptique. L’Irlande et l’Écosse se révoltent « au nom du Roi ». Il passe en Irlande, animé d’une « furie sanguinaire » et en neuf mois réprime le soulèvement, dans les journées décisives de Drogheda et Wexford. Puis c’est le tour de l’Écosse dont il écrase les troupes à Dunbar et à Worcester.

Cromwell a vaincu tous ses ennemis. Il règne. Il est nommé lord Protecteur. Il a toute la puissance. Qu’en va-t-il faire ? Rien. Littéralement rien ; il ne sait quel régime adopter. Il dit « qu’une organisation qui rappellerait le pouvoir monarchique serait très pratique » et instaure un gouvernement militaire qui semble bien pire à la nation que l’absolutisme de Charles Ier. Lorsque les mécontents disent : « Nous nous sommes battus pour que la nation puisse se gouverner selon son choix », Cromwell répond avec une impuissance pleine d’angoisse : « Mais, où le trouverons-nous, ce choix ? Chez les épiscopaliens, les presbytériens, les indépendants, les anabaptistes ou les égalitaires ? » L’infirmité de la dictature anglaise se trahit dans cette réponse.