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fert du Corps législatif à Saint-Cloud et attribue à Bonaparte le commandement des troupes de la garnison de Paris. Cette première partie de l’opération marche à peu près sans encombre.

Le 19, — il était maladroit au possible de prévoir un coup d’État en deux journées — les Conseils avaient eu le temps de réfléchir. Les partisans de Sieyès, modérés pour la plupart, étaient déroutés par les manœuvres de leurs adversaires. Les intellectuels hésitaient devant le pouvoir : selon le mot admirable de l’historien Albert Vandal, « l’Institut était en train de manquer son coup d’État ».

Les militaires faillirent manquer le leur encore plus. Bonaparte se montra d’abord aux Anciens, où l’on venait d’annoncer la démission du Directoire, afin de réclamer une nouvelle constitution. Il parla assez mal. Aux Cinq-Cents, ce fut pire : on l’accueillit aux cris de « À bas le dictateur ! À bas le tyran ! Hors la loi ! » Il se tira avec peine de la bagarre, monta à cheval pour haranguer des troupes hésitantes, à peine remis d’une sorte d’évanouissement, le visage ensanglanté par des écorchures qu’il s’était faites dans son énervement. Il criait qu’on avait voulu l’assassiner.

Tout fut sauvé par son frère, Lucien Bonaparte, président des Cinq-Cents. Celui-ci prévint