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voyage au pays des brahmes.

Pendant ce temps-là les femmes qui n’assistent pas aux pompes funèbres poussent dans la maison du mort des gémissements et des cris effroyables.

Chemin faisant on a soin de s’arrêter trois fois, à chaque pause on ouvre la bouche au mort, et on y met un peu de riz cru et mouillé, afin qu’il puisse à la fois manger et boire.

J’ai entendu dire que ces stations avaient au fond un motif plus sérieux. Il arrive souvent que les gens que l’on croyait morts ne l’étaient pas complètement, ou que, l’étant, ils ont ressuscité, et voici comment. Les juges des enfers qui, sous la direction de Yama, sont occupés de trier les vies humaines qui doivent être tranchées, exactement comme on trie deux espèces de graines différentes qui se sont mélangées dans la rapidité de l’opération, vu le grand nombre de gens qui meurent de minute en minute, ils sont, on le conçoit, sujets à se tromper. Alors il faut donner le temps à Yama, qui vérifie les opérations de ses aides, de reconnaître leur erreur.

La méprise une fois établie, il faut encore que l’âme du mort ait le temps d’arriver au funèbre séjour, où Yama, dès qu’il l’aperçoit, la renvoie immédiatement sur la terre achever le cours de son existence, en lui faisant ses excuses pour l’avoir dérangée.