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RÔLE DE L’ESPACE ET DU TEMPS

testable sur l’adulte. Sa volonté exerce une action plus immédiate sur ses organes, car c’est précisément dans la main de l’enfant que l’arrêt et le mouvement se localisent, avec une facilité surprenante, de la manière la plus variée. On peut dire que, dans l’étude du piano, la précision rigoureuse des attitudes et des mouvements semble chose toute naturelle à l’enfant si, dès le début, on empêche l’idée de désordre de naître, en lui enseignant les moyens par lesquels l’ordre peut s’établir.

À l’adulte, au contraire, on a beau indiquer ces mêmes moyens ; sans un effort considérable et prolongé, ils sont hors de sa portée. Chez lui, l’affinement fonctionnel que la main est susceptible d’acquérir a été entravé en partie par les adaptations journalières dans lesquelles les attitudes et les mouvements ne subissent que des différences grossières. Sous l’influence de ces habitudes acquises, sa main ressemble plus à une pince à deux branches qu’à un compas formé par cinq branches capables de positions et de mouvements divers, tels que la nature a constitué la main. Cet automatisme rudimentaire correspond en réalité à une véritable dégradation du mécanisme manuel, qui rend ensuite très malaisée la mise en jeu de combinaisons affinées en rapport avec un état de conscience artistique.

Cette supériorité de l’enfant dans l’éducation manuelle, devrait attirer l’attention des éducateurs ; elle doit correspondre à une supériorité dans l’éducation intellectuelle ; peut-être sait-on aussi peu en tirer profit pour le développement de son intelligence qu’on ne tire habituellement profit de ses