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MISS MOUSQUETERR.

Après quoi, il s’étend sur une natte, tourne le dos à ses compagnons et s’endort.

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Depuis deux fois vingt-quatre heures, sir John partageait le Réduit Central avec le Maître du Drapeau Bleu et le duc de La Roche-Sonnaille.

Dire qu’il avait pris son parti de l’aventure serait exagéré, mais enfin, il ne gémissait plus ; il avait cessé de se répandre en invectives, en récriminations dont l’inutilité lui avait été péremptoirement démontrée.

Oh ! il n’en était pas venu à l’amabilité. Sa physionomie contractée, boudeuse, menaçante lui donnait une étrange ressemblance avec le bulldog. Cependant, comme il n’aboyait pas, ses compagnons de captivité ne s’en inquiétaient pas le moins du monde.

Une autre inquiétude pesait sur eux. Depuis deux jours, leurs amis n’avaient prononcé aucun appel à l’aide du parleur. Cependant, Mona, Sara, Violet, Max avaient bien quitté le camp anglo-russe ; ils s’étaient bien rencontrés avec les enfants chargés de les guider. Les prisonniers avaient assisté, grâce au téléphote, aux moindres détails de leur départ. Alors, pourquoi ce silence ?

La route qu’ils devaient suivre, roule que Dodekhan avait minutieusement tracée à Joyeux, avait dû les amener, la veille, à un refuge, le poste R. Des charpentes y étaient disposées à souhait pour recevoir le parleur.

Max Soleil eût dû appeler dans la soirée de la veille. Pourquoi ne l’avait-il point fait ? Question douloureuse qui s’implantait dans le cerveau des jeunes gens, leur causant une douleur sans cesse avivée par les suppositions de l’imagination.

Ah ! ce Lobster, pourquoi était-il venu ? Seuls, les captifs eussent déclenché le téléphote. Sur l’écran, ils eussent parcouru la route désignée aux gamins. Les images leur expliqueraient la cause du silence dont se déchirait leur cœur.

Mais le gentleman était là, revêche, scrutant d’un air soupçonneux leurs moindres gestes. Pourquoi apprendre à cet espion qu’immobilisés ici, sous terre, leurs yeux restaient libres, libres d’errer dans les solitudes environnantes, libres de se mêler à la vie de ceux qui marchaient sous la voûte du ciel.

Cependant, leur inquiétude croissait d’heure en heure. Vers le soir, Lucien se rapprocha de Dodekhan.

— Je songe, murmura-t-il en abaissant la voix de façon à n’être point entendu par l’Anglais, je songe à ceci : Que ferions-nous si la plaque vibrante nous apportait l’appel de nos amis ?