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UN ENFER SCIENTIFIQUE.

Et pillards comme tous leurs pareils, ils ont emmené les yaks, les bagages, les vivres.

La faim va se joindre au froid pour détruire les infortunés qu’un dévouement sublime a conduits sur les plateaux désolés.

Max demeurait là, les pieds dans la neige, accablé par ce coup du sort. Pourquoi rentrer sous la tente puisqu’avec lui entrera le désespoir !

Une voix bien connue l’arrache à ses réflexions :

— Qu’est-ce que vous faites-là ? Auriez-vous l’intention de dresser un bonhomme de neige ?

Il sursaute violemment. C’est la voix de miss Violet. La portière de la tente s’est légèrement soulevée, et par l’ouverture se montre le doux visage de la jeune fille.

— Il fait un froid terrible, dit-elle encore. Faites-nous vite porter le thé et rentrez. Je grelotte à vous voir ainsi dehors.

La bande de feutre retombe. Violet a disparu. Et Max reste là, chancelant, éperdu.

Le thé ! Elle a demandé le thé. En reste-t-il seulement ? Ah oui, une boîte entamée est sous la tente. Pendant quelques heures encore, la boisson aromatique permettra de lutter contre la température glaciale.

Allons, la lutte suprême est commencée. Max doit à ses amis, à lui-même de lutter jusqu’au bout. Il tend ses nerfs, parvient à se dominer, et d’un pas ferme, regagne la tente.

Son entrée cause une stupéfaction. Il est si pâle ; ses yeux expriment une résolution si désespérée que tous se figent en l’attitude du moment. Et c’est dans un silence angoissant qu’il parle :

— Mes amis, nous avons devant nous quelques heures à peine pour atteindre l’armée ou pour mourir.

— Que dites-vous ?

Tous chuchotent cette interrogation anxieuse.

— Je dis ce qui est malheureusement trop certain. Notre guide, nos serviteurs nous ont abandonnés cette nuit, emmenant avec eux les bêtes de somme et les bagages.

— Les misérables, glapit John Lobster. L’Angleterre tirera une vengeance éclatante…

— L’Angleterre ignorera le trépas de voyageurs perdus sur les Hauts Plateaux, et auxquels la neige voile les sentiers, répondit douloureusement le romancier.

Puis d’une voix plus ferme :