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MISS MOUSQUETERR.

nières se sont évadées malgré toutes les précautions prises. Plus de traces, plus rien.

Au hasard, sur de fausses pistes, trompés par des ressemblances, des signalements tronqués, nous allons jusqu’à Bombay, poursuivant les images chères sans parvenir à les joindre. Nous réintégrons Calcutta. Nous allons retenir nos places à une Agence de Navigation, et là nous apprenons que six jours plus tôt, Mona et la duchesse ont pris passage sur l’Oxus, paquebot des Messageries Maritimes à destination de Marseille.

— Elles n’étaient donc plus considérées comme pirates ?

Labianov leva les bras vers le ciel en un geste découragé :

— Est-ce que je le sais ? Est-ce que je puis comprendre l’incompréhensible ? Ne nous adressons pas des pourquoi inutiles. Ashaki et moi nous embarquons sur le premier steamer en partance. Nous les joindrons bien à la fin ! Oh ! la lente traversée de l’Océan Indien, de la mer Rouge ! Nous faisons escale à Port-Saïd. Une légère avarie de machine exige un arrêt de trente-six heures. Nous descendons à terre. Vous connaissez Port-Saïd, une ville anglaise jaillie du sol égyptien. Nous nous promenons lentement, avec la badauderie ennuyée de voyageurs qui tuent le temps. Une querelle de fellahs nous arrête. Des gens de même condition les entourent, excitant les adversaires ; c’est un vacarme assourdissant. Un remous se produit. Je suis séparé du comte Ashaki. Une étoffe de laine m’encapuchonne, m’aveugle, vingt mains me saisissent, me poussent dans une chaise à porteurs. Lié, à demi étouffé, je ne puis faire un mouvement. Je sens que l’on m’emporte. Où ? Pendant combien de temps. On m’extrait enfin de ma prison, on me débarrasse de mes liens. Je suis au seuil d’une délicieuse villa égyptienne. Autour de moi un riant jardin. Des serviteurs s’empressent à mes ordres. Seulement, ils refusent de répondre à mes questions. Je suis prisonnier. De qui ? Pour quelle cause ? Des semaines, des mois s’écoulent sans que je découvre le mot de l’énigme. La surveillance de mes laquais-geôliers ne se dément pas une minute. J’ai acquis la conviction désolante que je ne recouvrerai la liberté que si mon persécuteur inconnu le veut, et je me désespère à la pensée qu’il ne voudra peut-être jamais.

— Stupéfiant, murmura lord Aberleen.

Comme s’il n’avait pas perçu l’exclamation, Stanislas Labianov continua :

— Un matin, le chef de mes serviteurs m’apprend que je suis libre, si j’accepte les conditions du Maître. Je suis étourdi par la soudaineté de cette