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dirais qu’à votre place, je renoncerais à remonter par le Nord.
xxxx« Je m’efforcerais de profiter aussi longtemps que possible du courant de la rivière M’Bomou, d’arriver ainsi le plus près du cours du bras principal du Bahr-el-Ghazal, et de gagner le Nil par cet affluent, avec étapes à Tamboura, Yaoued, El Ghersh, etc., etc.
xxxx« Mais, je le répète, ce n’est là qu’un conseil.
xxxx« N’y voyez, je vous prie, mon cher commandant, qu’une nouvelle preuve de l’intérêt amical que je porte à votre admirable expédition.
xxxx« Et recevez les souhaits de votre dévoué. »

Ce fut le jour de Pâques de l’année 1897 que le commandant reçut cette épître affectueuse.

Il était alors au confluent du M’Bomou et de l’Oubanghi.

Il allait renvoyer la flottille en arrière, et lui-même se proposait de se diriger vers Dem-Ziber avec ses hommes.

La lettre de M. Liotard l’attrista sans l’abattre.

En hâte il fit appeler les divers officiers attachés à la mission.

Et quand ils furent tous rassemblés autour de lui, il leur lut la missive qui venait de lui être, apportée.

Puis il leur donna également lecture des dépêches, articles de journaux et autres documents dont M. Liotard avait accompagné sa lettre.

Tous demeurèrent atterrés.

Alors il les regarda longuement avant de parler. Enfin il se décida. Et d’une voix calme, dans laquelle l’oreille la plus subtile n’aurait pu reconnaître aucune émotion.

— Messieurs, dit-il, pour nous rendre de l’Oubanghi au Nil, il existait deux routes, l’une par le Kordofan, l’autre par les marais du Bahr-el-Ghazal. La première, sans doute plus aisée, nous est fermée par les bandes mahdistes. Je pense donc qu’il convient de prendre la seconde.

Prendre la seconde, cela signifiait s’engager dans les marécages du Bahr-el-Ghazal, occupant un territoire vaste comme la France, dans cette immense plaine inondée, parsemée de myriades d’îlots où croissent les roseaux géants, les bambous hauts de sept et huit mètres, dans ce dédale de canaux, de