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Du reste, le succès de cette journée devait avoir un résultat meilleur encore que ne le supposait le chef de la mission lui-même.

L’exagération chillouk faisait maintenant des Français des êtres invaincus et invincibles, on allait en avoir la preuve.

Le soir même de la victoire, tandis que les Sénégalais et les auxiliaires Yaconcas, au visage tatoué, donnaient la sépulture aux morts, un cavalier arriva au galop dans la ville.

C’était un nomade, enveloppé d’un long burnous flottant.

Il se fit indiquer la demeure du commandant.

Renseigné, il s’y rendit, descendît de cheval à la porte, jeta la bride aux mains d’un gamin qui regardait et pénétra dans la maison.

Marchand était à table.

L’indigène le salua d’une de ces révérences de grand style dont les Arabes ont le secret.

— Tu es le commandant français ? dit-il ensuite.

— Oui. Et toi, qui es-tu ?

— Je suis Akbar, secrétaire du sultan chilliouk Fadel.

— Tu m’apportes un message.

— Oui.

— Donne.

Le courrier tendit à l’officier un pli, portant le sceau du sultan chef-général de toutes les tribus chilloukes, et suzerain de Ra-Moeh, cheik du district de Fachoda.

La missive, traduite aussitôt par Landeroin, disait en substance que Fadel avait pensé longtemps qu’Allah était avec le Mahdi.

Mais, en présence du succès remporté le jour même par les Français, il avait compris son erreur.

L’œil d’Allah s’était détourné du Khalife, pour se poser avec douceur sur les Européens venus du Sud.

Cela, afin d’indiquer aux Croyants quelle était la volonté de Celui qui est le plus Grand.