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Partout ailleurs, les herbes se montraient vivaces, d’un vert sombre indiquant la terre humide, féconde en liquides nourriciers.

Leur compagnon ouvrit le coffre de l’automobile dont il tira trois petites pelles plates et tranchantes.

Il garda l’un de ces instruments et tendit les deux autres aux voyageurs.

— Que devons-nous faire de cela ? questionna la jeune fille.

— Enlever les plaques de gazon aux endroits que je vous désignerai.

Et comme ils le regardaient avec stupéfaction, ne concevant rien à la bizarre occupation a laquelle on les condamnait, il poursuivit avec un commencement d’impatience :

— J’ai enfoui un trésor ici ; je le déterre, voilà tout. À présent, assez causé, au travail !

S’il était ennuyeux d’accepter les ordres du personnage, le labeur, en lui-même, n’avait rien de bien pénible. Aux endroits désignés, les voyageurs, grâce à leurs pelles parfaitement adaptées à cet usage, découpaient des carrés de gazon, qu’ils soulevaient en glissant au-dessous la palette de leur outil, agissant alors comme un levier.

Ivan, puisque leur guide leur était connu sous ce nom, venait derrière eux. Au centre de chacun des espaces dénudés, il enfonçait jusqu’au manche la lame tranchante, exerçait une pesée, puis se penchait, fouillait dans la terre soulevée, y prenait des objets qu’il enfouissait aussitôt dans un sac de toile jeté en bandoulière sur son épaule, puis replaçait les plaques de gazon. Que ramassait-il ? Ni M. Defrance, ni sa fille ne parvinrent à le voir.

Ils remarquèrent, seulement qu’ils opéraient suivant un cercle concentrique à la clairière. La remarque était certainement juste, car, alors qu’en enlevant cette dernière motte herbeuse, la Canadienne se déclarait avoir parcouru la complète circonférence, Ivan grommela :

— Reposez-vous. C’est fini. On viendra vous reprendre dans une heure.

Il sautait en même temps sur l’automobile.

— Vous nous abandonnez ? s’écrièrent les voyageurs.

L’autre eut un haussement d’épaules.

— Non, non, rassurez-vous. Vous êtes un autre trésor. Pas de danger que l’on vous oublie. On vous reprendra dans une heure, comme je vous le dis.