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darmerie russe, que personne ne parut prêter attention à cette étrange action.

Le sous-officier donnait ses ordres.

Deux de ses subordonnés se glissaient dehors, accompagnés par le gardien. Ils allaient porter aux alentours la consigne donnée par Dick Fann.

Celui-ci maintenant n’était plus revêtu que de sa combinaison noire. Sur son visage il appliquait le masque de soie, également noir, dont il s’était muni. Puis, se tournant vers le sergent :

— À mon signal, vous laisserez deux hommes ici ; j’aurai un prisonnier à leur confier. Avec les autres, vous vous porterez à l’hôtel no 33.

L’interpellé salua. Et Dick, assuré d’être obéi, se coula dehors, s’enfonçant dans le parc. La nuit était profonde. Au loin cependant, à travers le lacis des branches dépouillées, il distinguait de vagues lueurs. Il devina les réverbères éclairant la perspective Sakhalinsk.

— J’ai compté cent vingt-cinq pas, murmura-t-il, depuis l’instant où j’ai perçu le signal, jusqu’à celui où j’ai atteint l’angle de la rue latérale qui m’a conduit ici… Cent vingt-cinq pas, perpendiculaires en direction au mur du parc, m’amèneront donc sensiblement en arrière du point où se cache le « lanceur de bombe ».

Et avec un sourire narquois :

— Par bonheur, les nihilistes agissent seuls… Seuls  !… Il y a le criminel et la bombe… C’est suffisamment compliqué comme cela.

La distance indiquée par lui étant franchie, il fit un crochet brusque vers les lumières lointaines.

— Maintenant, attention, il faut arriver sur mon adversaire sans qu’il soupçonne ma venue.

Et, brusquement, Dick disparut. Il s’était couché sur la terre et, forme noire perdue dans le noir, il rampait sans bruit.

Quiconque eût pu le voir eût évoqué la pensée de ces larves diaboliques dont se peuplent les légendes terrifiantes du moyen âge.

Il progressait lentement, sans que le plus léger bruit trahît ses mouvements. La bise, complaisante alliée de l’audacieux Anglais, soufflait par rafales, faisant claquer les branches ainsi que des ossements entre-choqués, couvrant tous les autres sons.

Bientôt, il parvint à la lisière d’un massif. À quelques mètres, il discernait le mur bas sur lequel se dressait la grille de clôture du parc.