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— Sa bombe… gronda le Russe. Vous en parlez à votre aise, on voit bien que vous n’êtes pas chargé de la recevoir.

— Non, mais je me chargerai de l’arrêter, ainsi que l’individu qui en sera porteur.

— Vous ?

— Moi.

Du coup, Son Excellence Milkanowitch considéra le jeune homme avec une stupeur admirative non déguisée.

— Par saint Stanislas, fit-il enfin, vous ne doutez de rien…

— De rien de possible, rectifia le détective amateur. Or, un porteur de bombe étant un être en chair et en os comme nous, cet être devant, pour lancer son engin, se trouver sur le chemin de votre logis au théâtre, il est permis d’affirmer que son arrestation est une simple question d’adresse.

— Et de courage, fit Milkanowitch d’un accent convaincu, car ces fanatiques, quand ils se voient pris, n’hésitent pas à provoquer l’éclatement de leur odieuse machine, donnant leur existence pour prendre celle de qui leur met la main au collet.

S’il avait voulu effrayer son interlocuteur, le fonctionnaire dut éprouver une déception, car Dick riposta par un éclat de rire, accompagné par ces mots :

— Vous reconnaissez vous-même que mon jeu sera aussi dangereux que le vôtre.

— Alors vous persistez ?

— J’ajoute même que je vous prie de faire droit à ma requête, si toutefois vous n’avez pas peur de courir le risque en ma compagnie.

Demander à un fonctionnaire s’il tremble est un sûr moyen de l’entraîner à toutes les témérités. Milkanowitch se redressa.

— Je courrai le risque, monsieur Dick Fann.

— J’en étais assuré, reprit l’interpellé avec une ironie si légère qu’elle passa inaperçue du Russe. Puis-je vous demander encore de… diriger la partie ? Je crois que presque tous mes succès viennent de ce que j’étais absolument libre de mes mouvements, et de plus seul à savoir vers quel but tendaient mes actions.

Et Milkanowitch fronçant ses épais sourcils grisonnants :

— Oh ! si vous manquez de confiance en moi, mettons que je n’aie rien dit.