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— Une lettre de M. Flag, professeur de chimie au collège.

Le magistrat s’arrête net. Il me couvre d’un regard surpris. Cependant, il tient la missive. Il reconnaît l’écriture… Je lis cela sur sa physionomie. Enfin, il se décide à prendre connaissance du contenu de cette enveloppe.

Certainement, il se demande comment je me trouve être le commissionnaire de M. Flag.

Et il parcourt les lignes avec la pensée qu’elles lui apporteront l’explication cherchée.

Ah ! bien ! elles lui apportent autre chose encore.

Une stupéfaction profonde envahit le visage du juge… et aussi de la confusion… Vraisemblablement, il reconnaît tout bas ses torts envers moi.

Il m’a criblé de reproches, sous les yeux du bandit qui s’est moqué de lui.

Et ma parole, si je ne l’aidais pas un peu, je crois qu’il n’oserait plus lever les yeux. Jusqu’à la consommation des siècles, il ferait semblant de lire le papier qui tremble dans sa main.

Heureusement, je suis un boy, et je lui dis :

— Toddy, comme vous le voyez, monsieur le juge, a fait disparaître son « signe vineux » à l’aide de compresses de radium.

— Oui, oui, balbutie le pauvre homme. Comment a-t-il pu se procurer du radium ?

— C’est ce qu’il avouera sans doute, quand il aura été arrêté.

— Évidemment, oui évidemment… mais pour l’arrêter ?…

— Il suffit de démontrer son identité peu flatteuse.

— Et pour démontrer ?

— Faire reparaître la tache de vin, ainsi que l’explique M. Flag.

M. Thomson hoche gravement la tête.

Ah ! à présent, son regard fixé sur moi n’a plus rien de dédaigneux. Je lui pardonne ses torts. Il convient d’être généreux quand on triomphe.

— Alors ?… reprend-il d’un ton hésitant…

Il me consulte, moi, le gamin de Paris. Quel succès pour les Parisiens !

Je n’en marque, du reste, aucun orgueil, et modeste comme la plus humble violette, je propose :

— Si Monsieur le juge voulait, ce soir, être à l’hôtel au moment du souper…