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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

Elles signalent quelque chose dont il convient de se défier… Il y a là-bas, en avant, dans ce flamboiement, un obstacle, un danger inconnu. Une rage s’empare d’eux.

Ils ont cru la lutte finie. Va-t-elle recommencer, en changeant de forme ? Après la bataille contre les ténèbres, devront-ils conquérir le droit de se baigner dans ces rayons de soleil, dont les lueurs dégradées arrivent jusqu’à eux ? Il faut se rendre compte.

Point n’est besoin de parler, de se concerter. Une âme commune anime la petite troupe qui vient de vivre de si effroyables heures.

Master Joyeux et miss Sourire apaisant leurs panthères, tous se coulent avec précaution vers l’issue.

Un peu en avant de l’orifice, des buissons tordus par le vent, enchevêtrés de ronces aux longues épines argentées, masquent la vue. Ils laissent entre la paroi rougeâtre du rocher et eux, une sorte de large couloir tapissé de gazon vert et dru.

Rien d’inquiétant là.

Malgré leur anxiété, Dodekhan et ses compagnons se sentent envahis par un bien-être indicible en se trouvant à l’air libre… en ne voyant plus autour d’eux les murs de granit qui, si longtemps, les étreignirent.

Un instant ils s’oublient au plaisir enfantin d’enfoncer leurs pieds dans le feutrage moelleux des herbes.

Mais l’inquiétude de l’esprit les arrache bientôt à cette béatitude. Une menace est suspendue sur leurs têtes, elle gêne l’expression de leur bonheur. Ils veulent la connaître.

Des appels, des bruits de voix humaines leur parviennent. Il y a des hommes là. Quels hommes ? Écartant les branches, se déchirant les mains aux ronces, ils regardent au delà de la barrière des buissons.

Une trentaine de Pavillons Noirs bivouaquant autour d’une source leur apparaissent.

D’abord, ils ne considèrent que la petite mare d’eau limpide, d’où s’écoule un ruisseau qui serpente à travers un plateau de faible étendue. L’eau qui réfléchit le bleu du ciel, l’eau dont les rides semblent emporter des rais de soleil… Ils sont si altérés ! Pour un peu, ils oublieraient la situation et courraient vers