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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

humaine !… À quoi sert de guérir, imbécile, si tu ne consoles pas ?

Il consulta sa montre :

— Minuit vingt… Il n’y a pas à dire… Je suis inquiet…

Comme pris d’une idée subite, M. Maulenc se dressa sur ses pieds, et sans bruit se dirigea vers la porte.

Sara n’avait pas fait un mouvement.

— Elle n’ouvrira les yeux qu’au matin, murmura-t-il encore. Aucun inconvénient à la laisser seule un instant.

Avec précaution, il passa dans le couloir, où de petites ampoules électriques dépolies répandaient une lueur discrète[1]. Puis sur la pointe des pieds, se glissa vers une porte voisine, à laquelle il frappa légèrement. Rien ne répondit.

— Tiens, fit-il, la clef est sur la serrure.

Et d’un mouvement irréfléchi, consécutif de l’inquiétude vague pesant sur lui, il fit mouvoir le pêne.

Sur le seuil, il s’arrêta stupéfait.

En face de lui, Mona debout était penchée à la fenêtre ouverte au large. Elle n’avait rien entendu, toute son attention concentrée par l’examen d’un objet extérieur.

Et, détail bizarre, le plafonnier électrique, éclairant la chambre, était entouré d’une légère gaze de soie rouge.

— Mademoiselle.

Pas de réponse.

M. Maulenc fit un pas dans la chambre, puis deux, et se trouva auprès de Mona toujours immobile et absorbée.

Juste en face, dans la nuit, comme en un trou d’ombre, brillaient deux lumières éloignées.

— Mademoiselle, fit doucement le docteur, pardon de vous troubler… excusez mon anxiété, il est minuit et demi.

Elle se retourna surprise, et le digne homme demeura bouche bée. Une transfiguration s’était opérée chez la jeune fille.

Une roseur colorait ses joues, ses yeux avaient des rayonnements bleus. Une expression d’espoir illuminait tout son être, et sous la clarté rubescente du

  1. Haïphong est éclairé à l’électricité.