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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

— Le signal a été vu, gronde l’athlète… avant une heure, il aura brillé sur tous les sommets d’ici à la rivière de Saïgon, apprenant aux hommes jaunes qu’il faut frapper.

Mais il s’arrête. Là-bas, auprès du point rouge, s’est allumé un second point de feu, et celui-ci a la couleur de l’or.

— Que signifie cela ?

Et, vaguement inquiet :

— Le Maître ne m’en a pas parlé. Qu’est donc ce signal de feu jaune ?

Dans un mouvement irraisonné, il regarde autour de lui, comme pour chercher la réponse à la question. Et il pousse un cri rauque.

En face de lui, à l’extrême pointe du Fils du Jour, tremble au vent un grand feu. La montagne semble une torchère gigantesque que couronne un bûcher d’or en fusion. Il regarde, croit percevoir une grêle silhouette humaine qui se profile un instant sur l’écran de flamme, puis s’engouffre, disparaît dans l’obscurité environnante.

Son bûcher, celui qui est de l’autre côté de la passe de Ki-Lua, baisse, s’éteint, transformé en cendres, d’où le vent des hauteurs fait capricieusement envoler des traînées d’étincelles, puis l’ombre s’épand de nouveau sur toutes choses.

San demeure immobile. Dans son cerveau, amnésie par une surhumaine terreur, aucune idée ne se dégage.

Nul ne savait, il le croit du moins, en venue en ce lieu pour obéir aux ordres du seigneur Log ; nul, par conséquent, n’a pu songer à contrecarrer ses desseins.

Quelle puissance a donc porté sur la montagne ce feu jaune ?

Tout bas, ses dents claquant de terreur, il murmure les noms sonores des génies des nuits.

Il frissonne au sifflement du vent, à ses plaintes alors qu’il se brise dans les défilés étroits ; les nuages qui parcourent le ciel en un galop échevelé, lui semblent être des dragons, chimériques troupeaux de la légende ; les étoiles scintillant entre les déchirures des nues lui apparaissent des yeux, qui clignent mystérieusement en se fixant sur lui.

Tout s’anime, tout grouille autour de lui.

Ses oreilles lui persuadent que les serpents de