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L’AÉROPLANE-FANTÔME

Mais un courant d’air s’établit. Comment ? Nul ne songe à se le demander. La fumée devient moins intense. Tous se précipitent dans le cabinet. Ils discernent la fenêtre ouverte au large, les deux officiers de garde.

Au fait, où est donc le prisonnier ?

Sans doute, les officiers font la même réflexion, car ils s’immobilisent dans l’attitude de la stupeur ?

Et l’Empereur demandant d’un ton sec :

— Qu’avez-vous fait de l’homme ?

Les interpellés ripostent par cette phrase ahurissante.

— Vous venez d’ouvrir, Sire : Il n’a pu sortir sans que vous le voyiez.

La colère du souverain éclate à cette réponse saugrenue.

— Voilà comme me trahit, commence-t-il…

Il ne continue pas. Les gardes ont eu un geste d’éloquente protestation. Tous deux s’écrient d’une voix tremblante :

— Sire, enlevez-nous nos épées, envoyez-nous devant un peloton d’exécution s’il vous plaît, mais ne suspectez pas notre fidélité. Nous avons été joués soit ! Nous méritons la mort. Nous vous supplions seulement de nous condamner comme maladroits, non comme traîtres.

Il y a dans l’accent des officiers une douleur si vraie que le souverain adoucit sa voix :

— Eh ! expliquez-moi seulement l’évasion de ce drôle… ?

— Expliquer, c’est comprendre, Sire, et nous ne comprenons pas.

— Enfin, un homme ne s’évapore pas en fumée.

— Cependant, Sire, nous ne voyons pas d’autre solution. Il nous parlait gaiement. On nous l’avait confié, non comme un criminel.

— Mais comme une sorte de parieur, intervint la princesse.

— Justement. Aussi trouvâmes-nous naturel de lui voir tirer un cigare de sa poche et l’allumer. Ce cigare devait être un composé chimique quelconque, car soudain la salle a été remplie de fumée opaque qui nous piquait les yeux, nous contraignait à tousser comme des malheureux. On ne se voyait plus. Nous avons entendu la voix de notre homme disant : « Quelle sotte plaisanterie. On suffoque ici, je donne de l’air… » Nous perçûmes le grincement de la fenêtre qui s’ouvrait… et bien sûr, il ne s’est pas envolé par la fenêtre.

Ce récit n’éclaircit rien. Exaspéré par le mystère nouveau, l’Empereur oublie toute prudence. Il charge les officiers d’interroger les gardes, les postes du château.