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L’AÉROPLANE-FANTÔME

— Où est-ce ?

— Juste en face, la grille en retour.

— Merci.

Cinquante pas plus loin, le préfet pénétrait dans la propriété ravagée par un inexplicable cataclysme.

Les arbres, à demi consumés, se zébraient de larges bandes noires, charbonneuses, indiquant l’action du feu. Les buissons, roussis, lamentables, hachés, donnaient l’impression d’avoir été éventrés par un cyclone de flammes.

Au milieu de ce décor désolé, des hommes s’agitaient. L’un d’eux s’approcha vivement. Le préfet reconnut le commissaire du quartier.

— J’ai procédé à l’enquête, fit celui-ci ; mais je n’y comprends rien.

— Comment ?

— Venez voir ce qui reste des bâtiments ; on croirait que tous les tonnerres du diable s’y sont donné rendez-vous.

Et ayant dépassé le rideau d’arbres qui masquait les constructions écroulées, le préfet comprit la justesse de l’énergique expression du commissaire.

Les pans de murs noircis, vitrifiés, semblaient avoir été léchés par une flamme d’une intensité inouïe, les charpentes de fer gisaient hachées, tordues, déchiquetées par endroits en copeaux métalliques.

Des dires des voisins, il résultait que le désastre s’était accompli en moins d’une minute, au milieu de détonations stridentes, comparables aux éclats de la foudre.

Ainsi partout, à Paris comme à Eissen, les témoins, sans se douter de leur ensemble, aboutissaient d’instinct à des comparaisons électriques.

L’attention du préfet, entraînée dans cette direction, relevait mille indices de fulguration. Ici, une solive de fer, percée comme par le passage d’une formidable étincelle ; plus loin, un rouleau de fil de fer, fondu, soudé en un lingot. Ah ça ! est-ce que Miss Veuve jonglait avec la foudre ?

Mais en dépit des recherches, aucun indice ne permettait de suivre une piste quelconque. Après des investigations minutieuses, M. Lepiquant dut s’avouer qu’il se trouvait en présence d’un fait inexplicable.

Et comme rien n’est aussi désagréable que de sentir braqués sur soi les regards interrogateurs de subordonnés, attendant de leur chef l’explication qu’ils sont inaptes à formuler eux-mêmes, le préfet prit le parti de s’en aller.

Après tout, les réponses de Londres et de Washington lui indiqueraient