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fous ! » ce qu’est le genre distingué et copurchic des dames bien élevées. Tâche de te souvenir mémorativement de ça, quand tu te gobergeras dans un luxe scintillant et fabulatoire, chez Mme la comtesse d’Accouplévoux.

— Une comtesse ! brâma Sophie émerveillée. Ma Zouzoune va tenir compagnie à une comtesse !

— Parfaitement, ma vieille !… Pour dire toute la vérité intrinsèque et mathématique, y’aura là quèques autres dames ou demoiselles compagnatives au même degré…

Ouvrant des yeux comme des trous d’obus, Sophie admirait ces mœurs aristocratiques avec une confiance d’autant plus grande qu’elle n’avait rien compris du tout.

Zouzoune la mit au fait, brutalement :

— C’est une maison de passe, quoi ! Je m’en fous, somme toute !… Être là ou ailleurs, qu’est-ce que ça peut bien me fiche ?… J’irai, chez ta comtesse. J’irai, quand ça ne serait que pour voir si on y réussira ce que personne n’a pu réussir jusqu’à présent. Ce coup-ci, ce sera vraiment la guigne des guignes, si on ne parvient pas à me la faire sauter, ma vertu !


xi


Sophie, Zouzoune et Casimir revêtaient leurs plus beaux habits pour se rendre chez la comtesse.

Graves et cérémonieux, comme s’ils allaient à une noce, — il y avait un peu de cela, somme toute — ils descendirent leurs six étages. Surprise énorme, événement extraordinaire dans leur vie, la concierge leur tendit une lettre, tout comme à des gens riches ! Sachant lire et écrire couramment, Zouzoune était, et de beaucoup, la personne la plus instruite de la famille. Ce qui lui conférait le droit imprescriptible de s’emparer de la missive.

— Quoi que ça veut dire ? fit-elle après avoir lu. Un notaire qui invite Mme Sophie Bourbeux, née Verduron, et sa fille Alexandrine — ça c’est Bibi —, à se présenter au plus tôt en son étude, pour assister à l’ouverture du testament de feu Alexandre Baliveau… Eh bien ! mémère, qu’est-ce qui te prend donc ?… Quoi qu’t’as, maman ?… Quoi qu’ t’as ?