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par un beau dimanche

impression de malaise et de froid soudain que l’on ressent quand on visite une prison.

Ils se trouvaient dans une pièce étroite et basse, lugubrement éclairée par une seule fenêtre, toute petite, vraie lucarne de cachot, protégée par d’énormes barreaux de fer. Le sol était de terre battue, les cloisons de branches d’arbres entrelacées, revêtues d’un enduit grisâtre qui se détachait par larges plaques et que nul badigeon n’avait jamais égayé. On pouvait toucher de la main les solives supportant à cru le plancher de l’unique étage, amorcé par une trappe sans couvercle à l’escalier sans rampe, étroit et raide, dont les marches trop hautes se profilaient dans un coin de la pièce même. Une couche épaisse et poisseuse de noir de fumée s’étalait partout, rabattue à chaque rafale de vent d’Ouest, pendant tant d’années, de la grande cheminée à manteau qui couvrait presque tout un pan de muraille. Dans la paroi du fond, un trou rectangulaire, qui ne paraissait pas avoir encadré jamais la moindre porte, laissait voir la seconde pièce, plus étroite, plus noire et plus lugubre encore que la première. Une autre ouverture, par où l’on ne pouvait passer qu’en se baissant, et fermée d’un volet vermoulu, communiquait avec l’obscur réduit, bauge plutôt qu’étable, où chèvres et cochons n’avaient jamais pu entrer qu’en traversant l’habitation des humains. C’était froid comme une cave, sinistre comme une geôle, couleur de cendre et de boue. Et, comme tout l’attestait, cela n’avait jamais eu d’autres couleurs que celles de la boue et de la cendre.

— Voilà, dit le docteur, le poétique asile où vivaient les vraies bergères, au temps de Boucher et de Watteau.

— Mais c’est un trou, un taudis infâme ! s’exclama M.  Hougnot.

— Ce fut jadis une des plus belles maisons du