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de petits et désagréables même, par nécessité ; tandis que j’étais plein de feu et d’inspiration pour ce qu’il y a de plus grand et de plus divin.

Mais ne rappelons pas ces temps malheureux où je fus jalousé ou peu senti, n’ayant jamais eu que le savoir et jamais le savoir-faire, chose bien différente et que l’on peut confondre facilement. Enfin, je l’ai trouvé, celui qui me rend à moi-même ; et ce qui me flatte le plus, c’est qu’il est Français. Le prix de ce tableau est fixé à six mille francs, dont trois sont déjà à ma disposition, et d’autant plus généreusement que cet homme parait faire autant de cas de mon bien-être que des intérêts de ma gloire. Il consent à ce que je ne m’occupe pour le présent que de notre tableau, que j’aille moi-même au Salon l’apporter et que je ne travaille pour lui qu’à mon retour à Florence. Est-on plus généreux, et suis je heureux de pouvoir te l’apprendre, cher ami ? À présent, je commence à espérer que je pourrai exécuter le projet que ton amitié nous a proposé, de mettre quelque chose de côté et de vouloir toi-même être notre administrateur. J’espère donc, dans le courant de l’année, pouvoir commencer à te remettre une somme. J’ai encore quelques petites rentrées et tout ira bien, j’espère.

Je ne perds pas un moment. Toutes mes heures sont comptées pour pouvoir arriver au Salon. Le tableau va tout seul ; je compte beaucoup sur lui. Tu me désespères de me dire que tu ne seras