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Le peintre d’histoire rend l’espèce en général, tandis que le peintre de portraits ne représente que l’individu en particulier et, par conséquent, un modèle souvent ordinaire et plein de défauts.


Tous les tableaux du Poussin se ressentent de l’étude particulière qu’il a faite de la peinture antique, devant la Noce Aldobrandine. Il a poussé la vénération envers les Anciens assez loin pour désirer donner à ses ouvrages l’air de vrais tableaux antiques, jusques et y compris la proportion des figures. Il nous a enseigné que, lorsqu’on veut représenter de pareils sujets de l’antiquité, il faut qu’il n’y ait rien dans le tableau qui nous fasse penser aux temps modernes. L’esprit se promène dans les siècles passés, et rien ne doit alors se présenter à lui qui puisse le tirer de cette illusion.


Il faut continuellement former son goût sur les chefs-d’œuvre de l’art. C’est perdre le temps, que de l’employer à d’autres recherches. On peut jeter les yeux sur les beautés inférieures, mais non les imiter.

L’artiste, quand il est sûr de marcher en bonne route et qu’il suit les traces de ses prédécesseurs qui jouirent d’une grande célébrité, peut alors s’armer de la hardiesse et de l’assurance qui conviennent au génie, et il ne doit pas se laisser détourner du droit chemin par le blâme d’une foule ignorante qui n’admire que ce qui est d’un genre bas et commun, comme elle.


Les petits tableaux flamands et hollandais sont, en petit, d’excellents modèles pour la couleur et l’effet d’un tableau d’histoire, et on peut les noter comme des modèles en ce genre.


Une nature à part ne peut exister.