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aime les amis de son père. Et quand reviendrez-vous nous revoir à Paris ? Hélas ! c’est une affreuse nuit qu’une pareille séparation.

LI
Dampierre, 27 juillet 1845.

Je suis dans la plus déplorable situation en prenant cette plume honteuse, et…

Comme je n’ai rien à dire pour moi, tu excuseras ton ami, ses soixante-quatre ans et sa tête, son esprit, son courage à supporter tout le chaos et la surcharge de travaux que l’on me demande. J’ai une belle et terrible église à décorer. Dieu me préserve du courant ! Je suis bien heureux, quand j’en puis refuser une partie. Et vive la gloire ! Riez, Monsieur ! (quand j’ai la mort dans l’âme, de toutes ces choses). Que nous importe votre bonheur, la vie tranquille à laquelle vous aspirez et qui, comme l’eau de Tantale, vous frise les lèvres sans que vous y puissiez toucher quand vous mourez de soif ; oui, que nous importe ? Travaillez, torturez votre esprit, souffrez, haletez, mourez, s’il le faut. Ah ! vous avez voulu être quelque chose, aimer l’art avec passion, cueillir quelque peu de gloire, avoir déjà des rues qui portent votre nom. Eh bien ! il faut payer tout cela ! Vous n’aurez donc pas de vieillesse calme, heureuse, non ! Et après tous les tourments de la vie, six pieds de terre !…

Voilà cependant, (et le tableau n’est pas chargé