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À M. Gilibert.
Paris, 4 novembre 1827.

… Enfin, le tableau d’Ingres est sorti de son atelier, et j’ai eu le plaisir de le voir hisser au plafond, où il se soutient très bien et où il acquiert beaucoup plus de fini. J’espère que l’on y remarquera un style de dessin qui est du genre le plus pur et le plus élevé, quoique de la plus grande simplicité. Malheureusement, le goût est complètement corrompu dans le public, et l’on n’apprécie que par réflexion ces qualités essentielles. Le public va, d’abord, courir à ces effets théâtraux ou fantasmagoriques qui sont de mode et auxquels tous ont sacrifié, excepté pourtant Horace Vernet.

Ce plafond de l¹Apothéose d’Homère est exécuté avec une hardiesse et une fermeté et, en même temps, une vérité remarquables. Le style seul y manque. Mais on devait s’y attendre, et je ne serais pas surpris que cet ouvrage ne soit le meilleur de tous ceux qu’Ingres a faits. J’ai eu une vue de tous ces plafonds en allant assister Ingres pour le placement du sien. Autrement, ce n’est que le 12 courant qu’ils seront livrés au public.

Il est décidé que le grand Salon est enfin rendu à l’Exposition. Gare ! à tous ceux qui n’y revont pas. De cette affaire, nous allons être enfoncés, si l’on nous laisse comme nous sommes.

Je vous avais dit que je comptais partir vers le 12. Mais, comme j’ai été jusqu’ici occupé pour Ingres et que je n’ai pu retoucher mes tableaux, je suis obligé de le faire maintenant, et ils ne pourront être placés que pour le changement qui doit avoir lieu en janvier. Je me décide à terminer les Nymphes. Il faut quelque chose de saillant. Les Vues (ou paysages) seraient excellentes si j’avais déjà un nom ; mais elles ne peuvent être appréciées par les ignorants que lorsqu’un ouvrage véritablement saillant