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Paul Véronèse, le tableau des Noces de Cana, que critiquent si bien nos artistes, ne fait aucun tort à cette copie. Mais il est lui-même réduit à peu de chose, par le mérite d’invention qui brille au plus haut degré dans ce chef-d’œuvre de Raphaël. Au reste, Ingres met l’original de cette peinture bien au-dessus de la Transfiguration.

Dans une lettre que j’écris à Debia, je lui parle de Mme Pezaroni. C’est un vrai monstre, pour la figure ; et son talent, comme artiste ou simplement comme chanteuse, n’est qu’une charge. Je ne crois pas que le mauvais goût ait jamais autant aveuglé les Parisiens que lorsqu’il leur fait préférer cette femme à l’incomparable Pasta.

Adieu, mon cher ami. Tout à vous.

Prosper Debia.
À M. Delmas aîné, à Montauban.
Paris, octobre 1827.

… Non seulement cela fait du bien de voir de près la marche d’un grand artiste, mais aussi lorsque cet artiste a les qualités d’un excellent ami qui cherche, de tous ses moyens, à vous être utile ou agréable. La société intime de cet homme est une des plus douces jouissances que l’on puisse éprouver.

Tu sens combien je fus effrayé de la manière avec laquelle M. de Forbin me déclara qu’il ne pouvait pas m’accorder un jour de délai pour remettre mes tableaux. Tu sais qu’il fallut m’éreinter pour arriver à temps. Qui eût pensé qu’hier je me suis présenté tout bravement au bureau de réception du Musée, avec mes deux petits tableaux (retouchés un peu sous les yeux d’Ingres et vernis), qu’on les enregistre sur-le-champ, que deux heures après le jury s’assemble, que ce brave Ingres s’y rend et qu’un moment après les deux tableaux étaient reçus à l’unanimité. Tu vois par là que les recommandations des grandes gens ne valent pas grand’chose, comme