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dans mon réduit où l’on se dit que l’on est empereur, que des gens prétentieux, Taux, superficiels, intéressés, méchants, médiocres.

La plus nombreuse école qu’on ait vue, depuis celle de David, ne m’a que très peu rapporté en espèces. Mais j’ai, en revanche, des ingrats, autant que possible. Je crie dans le désert : « Aimez le vrai et le beau qui en dérive » ! Sourds à ma voix, ils blasphèment la vérité, chérissent l’erreur, pratiquent la mauvaise foi et l’employent à leurs fins. Passionnés avec fureur, ils me font l’honneur de la complicité avec les Anciens, les Saints et les Dieux dont, avec les dents et les ongles, ils cherchent à détruire le piédestal de granit. Babilona ! Babilona ! Des arts ? on n’en veut plus ; on s’en passe. Les arts sérieux ? encore moins ; honnis, oubliés ! Qu’a done à faire, en des temps si barbares, (car nous sommes entièrement dans la barbarie), un artiste qui croit encore aux Grecs et aux Romains ? Il doit se retirer. Et c’est ce que je fais. Plus un coup de pinceau, pour ce public qui a si peu de sympathie pour l’art noble.

Se retirer ? « Mais, me dira-t-on, vous avez pour vous tant de bons esprits, d’honorables soutiens. Persévérez ! » Voulez-vous que je persévère toujours ? Voyez mes sacrifices ; voyez que, pour avoir donné tout mon temps à cet art, je ne suis, (hormis l’honneur que font quelques-uns), arrivé à rien ni à aucune liberté sociale, comme je l’espérais. Adonc après mon glorieux échec du Symphorien, j’ai tout essayé pour me