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À Monsieur Gatteaux.
Rome, ce 24 novembre 1835.

Je ne commencerai jamais mes lettres que par des remerciements pour tout ce que vous êtes et pour tout ce que vous faites pour nous. Quel ami nous avons en vous et comme nous vous sommes reconnaissants ! Continuez, cher ami, vos francs et parfois sévères avis, âpres, comme on dit, à la bouche, mais doux au cœur. Je les prise, croyez-le bien, et vous le savez, comme la marque la plus précieuse et la plus certaine de votre vraie amitié.

« Que diable allait-il faire dans cette galère ? » Voilà, il est vrai, un peu ma situation, touchant les Loges. Tout ce que vous me dites sur ces copies est vrai, très vrai ; mais enfin, si, comme je l’espère, ces copies, (et mon intelligence même ne serait pas de trop pour les faire, car, pour bien rendre, il faudrait être l’homme qui a créé, si cela se pouvait), si, dis je, ces copies viennent bien avec le soin que nous y mettons, nous aurons le droit de les défendre, parce que nous aurons été, mieux que personne, capables de les faire. Alors, en tenant à ce que leur place soit, comme celle des originaux, à vingt pieds de l’œil du spectateur, nous pourrons tout braver et, par de bonnes raisons, envoyer paître cette tourbe qui n’a ni le goût ni le secret des arts.

Cependant, voilà qu’ici on commence à me tourmenter quant aux moyens d’exécution, si bien que je suis obligé de montrer les dents. Si je n’avais commis la faute de faire venir et de demander trop positivement deux enfants à leur père qui n’a bientôt qu’eux pour soutiens, tous ces dégoûts, (quitte même à perdre les avances d’échafauds et autres), m’auraient déterminé à rendre par démission cette affaire. Elle ne laisse pas, d’ailleurs, de me prendre beaucoup de iemos, comme administrateur et comme régenteur des