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petit nombre de bons esprits qui l’ont vu. Ce succès précurseur ne nie rend que plus exigeant pour moi-même. Il est très avancé d’ensemble, encore rien de fini, mais tout est trouvé. Je n’ai plus que l’exécution de plaisir. Que ne puis-je te l’envoyer dans ma lettre ?

J’ai vendu dernièrement mon Œdipe : il est exposé par son propriétaire dans une certaine galerie Golbert et en étrange compagnie, je t’assure. Il y est fort admiré des connaisseurs, et ce sera toujours une de mes meilleures œuvres. De ma propre autorité, j’y ai exposé le tableau des Nymphes de notre cher ami Debia. Il y occupe une bonne place, et plusieurs personnes m’en ont parlé avec beaucoup d’éloges. Dans quelque temps, je ferai faire un nouveau cadre au second, si cela lui va, ou je retirerai les Nymphes. Charge-toi auprès de ce bon ami de tous mes tendres sentiments d’estime, avec mes respectueux souvenirs pour son aimable famille. Je salue de même la cara patria hella et tous les amis que j’aime et qui m’aiment.

Mais pendez-vous, braves Gilibert et Debia : on vient d’interpréter Don Juan, comme jamais il ne l’a été, et vous n’y étiez pas ! Que puis-je t’en dire, cher ami ? Je suis encore émerveillé. Épouvanté d’un si bel œuvre, plus jeune et plus beau que jamais, je peux te dire que cela est beau à faire mal.

Homme divin, vraiment ! C’est pour cela que sa sœur, âgée de 80 ans, vient de mourir dans la