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les sots qui regimbent contre la saine critique. Nous causerons de tout cela, comme si tu étais dans mon atelier, heureux si nous pouvions y passer ensemble une partie de notre vie, y profitant de ton esprit et heureux, comme Marc-Aurèle chez ce peintre d’Athènes où il allait en philosophe apprendre, à ne pas confondre le vrai avec le faux.

Je veux bien faire le pendant au tableau de Henri IV. Si M. Graves ne me donne pas de sujet, fais-lui part de celui-ci : Sully déchirant la promesse de mariage que le Roi fit à Mlled’Entraygnes, trait bien connu qui met sur la scène deux vrais amis, comme Pylade et Oreste.

À propos d’avis, non seulement Bartolini ne m’a jamais fait part de l’arrivée de notre tableau, mais il a y près de deux mois que je ne l’ai vu. Il doit, à mon invitation réitérée depuis quatre mois, venir dans mon atelier. Tu vois comme il est empressé et comme je dois tenir compte de lui ; ainsi fais-je, sans être brouillé, ouvertement. Nous avons assez de tact l’un et l’autre, pour vivre très bien l’un sans l’autre. Je te ferais un livre de tout ce que nous avons souffert avec une patience de Jésus-Christ, de toutes ses impertinences, brusqueries, caprices et gasconnades, (car il est, lui, gascon véritablement). Il vit abandonné à ses passions et à ses mauvaises affaires, tandis que nous sommes désirés et fêtés. Notre caractère et notre vie honorable nous ont fait des amis, à toute épreuve. En lui écrivant, ne lui