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suprématie dans tous les genres appartient aux seuls peintres d’histoire. Mon sujet est, d’ailleurs, si beau ! Le Jugement dernier y figurera presqu’à la moitié… J’attends votre décision sur le principal personnage, et j’ai depuis pensé que, s’il y avait de l’inconvénient à le mettre sur la scène[1], je peux faire le moment où l’on chante le Miserere, tous les cardinaux prosternés à leurs places, vus de dos, et le Pape prosterné devant l’autel, comme cela se pratique… — (Op. cit.).

Ingres.

Rome, 26 mai 1814.

… Je reviens à votre tableau. L’essentiel est que vous en soyez content. Après cela, nous verrons le plus ou moins de foule qu’il aura au Salon. Je suis bien peiné de n’avoir pas reçu la lettre de M. Girodet : faites-moi l’amitié de m’en récrire deux mots. Je désirerais aussi beaucoup que M. Gérard vît mon tableau, car je tiens beaucoup à l’estime de celui-ci. Quant à David, laissez-le ; j’ai mes grandes raisons de n’avoir avec lui aucune espèce de contact, et je désire seulement qu’il voie mes ouvrages à l’Exposition[2].

  1. En marge de la lettre, on lit ces mots écrits plus tard par M. Marcotte : « J’avais demandé à Ingres le tableau de la Chapelle Sixtine, parce que 1 je savais qu’il en avait fait un dessin remarquable ; mais j’ignorais comment ce tableau, que j’avais demandé lorsque j’étais en mission sur les bords du Rhin, à Coblentz, était composé… Pie VII était alors séquestré, soit à Savone, soit à Fontainebleau. On voit qu’Ingres hésitait à le mettre en scène, dans la crainte de blesser l’Empereur ; mais, moi, je n’hésitai pas, et je fis bien.
  2. « Ah ! comme on m’a trompé ! » s’était écrié Ingres en arrivant m Italie et en contemplant Raphaël et les Grecs. N’est-ce pas la raison la plus plausible de son antipathie pour son maître David et son école de Romains ?