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À OSTRAAT

Parce que j’ai mal agi avec ton fils ?

Mais l’autre n’est-il pas aussi ton fils… et il est le mien, n’oublie pas cela.

(Elle regarde furtivement tous les portraits).

Je ne les ai jamais vus terribles comme cette nuit. Ils ne me quittent pas des yeux !

(Elle frappe du pied par terre).

Mais je ne veux pas de cela ! Je veux avoir la paix dans ma maison.

(Elle commence à tourner tous les portraits contre le mur).

Oui, fût-ce celui de la Sainte Vierge elle-même… L’heure est venue.

Pourquoi n’as-tu jamais écouté mes prières quand, de toute mon âme, je te priais de me rendre mon enfant ?

Pourquoi ?

Parce que le moine de Wittenberg a raison : il n’y a pas d’intermédiaire entre Dieu et les hommes.

(Elle respire lourdement et continue sur un ton de plus en plus égaré).

C’est heureux que je sois au courant de ces choses-là.

Personne ne pourra témoigner contre moi.

(Soudain elle ouvre les bras et murmure) :

Mon fils ! Mon enfant adoré ! Viens vers moi !

Ici, je suis ici !

Silence ! Je veux te dire quelque chose.

On me hait là haut, là haut par delà les étoiles, parce que je t’ai mis au monde.

La volonté de Dieu fut que je devais me sacrifier pour la patrie ; mais j’ai choisi moi-même ma route ; c’est pourquoi il m’a fallu souffrir tant et si longtemps.