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LES REVENANTS

avoir une maison très convenable dans la petite rue du Port. Il ne faut pas une grosse somme pour l’acquérir. Et on pourrait en faire, vois-tu, comme une sorte d’abri pour les marins.

régine. — Mais je ne veux pas te suivre ! Il n’y a rien de commun entre nous. Va ton chemin.

engstrand. — Tu ne serais pas longtemps avec moi. Diantre non, mon enfant. Je n’aurais pas cette chance. Il est sûr que tu saurais te retourner. Une jolie fille comme toi, car tu l’es devenue, ces dernières années.

régine. — Eh bien ?

engstrand. — Il ne se passerait pas un long temps avant qu’on ne vît venir un pilote, ma foi, peut-être un capitaine…

régine. — Je ne veux pas prendre mari parmi les gens de cette espèce. Les marins n’ont pas de savoir-vivre.

engstrand. — De quoi n’ont-ils pas, les marins ?

régine. — Je les connais, te dis-je. Ce ne sont pas des gens avec qui on se marie.

engstrand. — Mais, tu n es pas forcée de te marier. On peut trouver son profit ailleurs tout de même. (Confidentiellement.) Tu connais l’Anglais — l’Anglais du yacht — eh bien ! il a donné trois cents écus, lui, et elle n’était certainement pas aussi jolie que toi.

régine, marchant sur lui. — Sors d’ici !