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ROSMERSHOLM

privée. Ma conduite n’offre aucune prise aux attaques.

mortensgaard, souriant tranquillement. — C’est là un bien grand mot, monsieur le pasteur.

rosmer. C’est possible, mais j’ai le droit de prononcer ce mot, si grand qu’il soit.

mortensgaard. — Même si vous scrutiez votre conduite aussi sérieusement que vous avez jadis scruté la mienne ?

rosmer. — Vous dites cela d’un ton singulier. Qu’y a-t-il ? A quoi faites vous allusion ? Est-ce à quelque chose de spécial ?

mortensgaard. — Oui, il y a une chose, une seule, mais il serait grave qu’elle tombât dans les mains d’adversaires malveillants.

rosmer. — Auriez-vous l’obligeance de m’apprendre de quoi il s’agit ?

mortensgaard. — Monsieur le pasteur ne pourrait-il pas le deviner lui-même ?

rosmer. — Pas le moins du monde. Je ne devine pas.

mortensgaard. — Allons il me faut desserrer les dents. Je possède une lettre fort extraordinaire, datée de Rosmersholm.

rosmer. — Vous voulez parler de la lettre de Mlle West. Est-elle donc si extraordinaire ?

mortensgaard. — Non, cette lettre-là ne l’est pas. Mais il m’est arrivé d’en recevoir une autre d’ici.