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ROSMERSHOLM

les !… Au lieu de cela, j’en ai cruellement souffert, sachant quel amer chagrin cela te causerait.

kroll. — Rosmer !… — Rosmer ! Je ne m’en remettrai jamais. (Le regardant douloureusement.) Te voilà donc aussi parmi ceux qui travaillent à l’œuvre de corruption et de ruine qui ronge notre malheureux pays.

rosmer. — C’est à l’œuvre de son affranchissement que je veux prendre part.

kroll. — Oui, je sais bien, c’est là ce que disent les corrupteurs et les égarés. Mais crois-tu vraiment qu’on puisse attendre un affranchissement quelconque de cet esprit qui empoisonne notre société ?

rosmer. — Je ne suis pas entraîné par l’esprit du temps, ni par aucun de ceux qui combattent. Je veux faire un appel à tous, tâcher d’unir les hommes en aussi grand nombre et aussi étroitement que possible. Je veux vivre et employer toutes les forces de mon être à ce but unique : l’avènement, dans ce pays, de la vraie souveraineté populaire.

kroll. — Ainsi tu trouves que nous n’en avons pas encore assez, de cette souveraineté ! Pour ma part, il me semble que tous, tant que nous sommes, nous allons bientôt nous trouver dans la boue, où la plèbe seule se complaisait jusqu’ici.

rosmer. — Voilà pourquoi je veux un régime populaire qui réponde à sa vraie mission.