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XLVI
INTRODUCTION.

Tlemcen et y remplir les fonctions de chambellan. Il lui recommanda en même temps d’amener avec lui tous les Arabes nomades qu’il lui serait possible de rallier à la cause des Abd-el-ouadites. Par suite de cette communication, Ibn-Khaldoun travailla avec tant de succès qu’il décida les principaux chefs arabes d’abandonner le parti d’Abou-’l-Abbas et embrasser celui du souverain de Tlemcen. Bien qu’il eût réussi dans cette mission au point de mériter toute la bienveillance de son nouveau maître, il ne s’en laissa point éblouir : agissant avec sa prudence ordinaire, il évita de se rendre auprès d’Abou-Hammou, et comme son frère Yahya venait d’obtenir sa liberté et d’arriver à Biskera, il l’envoya à la cour de Tlemcen pour y remplir les fonctions de chambellan en qualité de lieutenant. « D’ailleurs, dit-il, j’étais revenu des séductions du pouvoir, et comme j’avais négligé depuis longtemps la culture des lettres, je m’abstins de m’immiscer dans la politique afin de pouvoir diriger mon esprit vers l’étude et l’enseignement. »

Malgré cette déclaration, nous savons de l’aveu de l’auteur lui-même qu’il ne cessa de travailler les Arabes en faveur d’Abou-Hammou et de servir d’intermédiaire dans une correspondance très-active qui se passa entre ce prince et Abou-Ishac, sultan de Tunis. Le souverain abd-el-ouadite avait pour but d’obtenir l’appui du monarque hafside contre Abou-’l-Abbas, devenu maintenant maître absolu de Constantine et de Bougie. Quant à Abou-Ishac, il se montra très-disposé à faire ce qu’on lui demandait, parce qu’il nourrissait contre Abou-’l-Abbas une haine extrême. « Et rien de plus naturel, dit notre auteur avec une naïveté tant soit peu maligne ; Abou-’l-Abbas était non-seulement son neveu, mais son rival. » Cette négociation avait déjà pris une excellente tournure quand la révolte des Hosein, tribu arabe qui habitait la province de Tîteri, vint tout déranger. Abou-Zîan, membre de la famille royale de Tlemcen, avait conçu le projet d’enlever l’empire à Abou-Hammou, et était parvenu à soulever les Hosein, une des populations les plus turbulentes de l’Afrique septentrionale. Il fallait châtier les rebelles, et pendant que le sultan agissait contre eux du côté du Nord, Ibn-Khaldoun