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des ventrées d’enfants turbulaient, soufflant dans des trompettes, barbouillés de pain d’épice, éveillés et morveux. D’autres étaient portés sur les bras et ils agitaient, en dansant dans leurs langes, des menottes poissées par le sucre d’orge. On se marchait sur les pieds, on se poussait, des galapiats jouaient du mirliton et gambadaient, faisant halte devant les tirs à la carabine, s’essayant à casser un œuf perché sur un jet eau. Il y avait, ici et là, des huttes encombrées de gens ; haussés sur la pointe de leurs bottines, appuyés sur les épaules les uns des autres, cherchant à voir par les créneaux des têtes, des massacres d’innocents, des poupées costumées en paysans, en mariées, en princes, qu’on abattait à coups de balles.

Le coup d’éclat, c’était l’envoi sur le dos de la mariée. Les remarques les plus saugrenues, les allusions les moins équivoques, s’échappaient de la foule alors que la pucelle tombait cul par dessus tête ; Anatole voulait absolument la démolir. Colombel, lui, disait qu’il faisait soif et Céline qu’il faisait faim. Anatole massacra un monsieur bien mis et, après avoir raté les autres, il s’en fut, vexé d’être traité de maladroit par sa maîtresse.

Avant que d’aller plus loin Colombel déclara derechef qu’il fallait s’arroser la luette. Les