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qu’elle avait infligées à Auguste ; elle se donnait tous les torts dans cette rupture, et le courage qu’elle s’était promis d’avoir dès qu’il serait devant elle, fuyait.

Céline pensa vaguement qu’il serait utile de distraire sa sœur et de l’empêcher de soupirer après la venue d’Auguste ; elle l’entraîna devant un marchand de bric-à-brac où l’on vendait des chiffons et des os, où s’entassaient des chenêts rongés de rouille, des lampes bossuées, des coquillages poussiéreux, des clysopompes veufs de leurs tuyaux et de leurs becs, des croix de la Légion d’honneur, des peaux de lapins, des boîtes à thé, des hausse-cols, des lèchefrites, des bottes, des jumelles sans verres, des mouchettes, des vases de fleurs artificielles, couronnés d’un globe sale avec chenille rouge en bas.

Céline louchait devant une table de nuit à coulisse, un meuble luisant comme du soleil avec son acajou nouvellement plaqué, lorsqu’Auguste apparut sur le pont.

— Le voilà ! soupira la petite toute remuée. Alors, comme si elles arrivaient à la minute, elles allèrent, sans se presser, à sa rencontre.

Désirée restait, à quelques pas, derrière sa sœur. Quand Céline eut terminé une série d’exclamations qui ne voulaient rien dire, ils demeurèrent cois, les uns devant les autres. Auguste, qui