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se voyaient depuis des années ; mais, tout en l’estimant et le trouvant gentil, jamais il ne lui était certainement venu à la pensée qu’ils pourraient se marier ensemble.

Vatard avait fait part de son projet à Céline, qui exécrait maintenant Auguste. Depuis qu’elle savait qu’un soir il s’était permis d’injurier Désirée, elle le considérait comme le dernier des hommes. Et pourtant Anatole lui en avait dit bien d’autres à elle ! mais elle n’y songeait même plus et réservait son indignation pour l’homme qui n’avait pas craint d’insulter sa sœur. Elle se chargea volontiers d’explorer le terrain. La sorte d’endolorissement qu’elle vit chez Désirée lui donna bon espoir. Elle se résolut à procéder avec franchise, et un jour, qu’assises devant le feu, elles veillaient le ventre de la malade, elle dit simplement : — Si tu tiens tant que cela à Auguste, épouse-le ; papa y consent, mais réfléchis bien avant que de faire cette sottise. — Une rougeur sauta aux joues de l’enfant quand elle apprit qu’elle était libre de se marier avec Auguste, mais elle n’eut pas ce cri de joie que Céline craignait ; elle baissait le nez, écoutant sa sœur qui reprenait : — Après tout, t’as peut-être été la moins bête de nous deux. Tu as voulu te marier, mais sans être dans la misère ; tu as de l’ambition, tu fais bien. Je ne sais pas pourquoi maintenant tu