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lité d’ouvrières payées aux heures, les tendit à la contre-maître qui les vérifia et les marqua d’une croix, et, traversant la pièce des assembleurs, elle dit à Auguste de venir, le lendemain matin, au quai, qu’elle y serait avec sa sœur, qu’ils auraient à causer de choses sérieuses.

Auguste accepta, mais il montra si peu d’enthousiasme que Céline devint très-satisfaite.

Depuis deux ou trois jours qu’elles ne bougeaient plus de la maison, les deux filles avaient nécessairement causé de leurs amours. Céline, que l’indolence inouïe de Désirée interloquait, voulait tirer au clair ses pensées sur Auguste. Elle trouva chez elle une froideur, une gêne qui la stupéfia. L’autre ne répondait point, ne s’expliquant pas bien elle-même l’indifférence qu’elle éprouvait maintenant pour lui. Vatard, de son côté, s’affligeait des allures mourantes de sa préférée. Le mot de Céline « que ce n’était pas la peine d’aller chercher un médecin, qu’il fallait simplement la marier, » avait porté. Il n’hésitait plus aujourd’hui à lui accorder toutes les permissions qu’elle voudrait. Il cherchait seulement à se débarrasser d’Auguste, à faire épouser à sa fille, si cela se pouvait, un autre qu’il avait en vue, Amédée Guibout, un neveu de Tabuche, un contre-maître jeune et gagnant de très bonnes journées. Désirée le connaissait bien d’ailleurs ; ils