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en polkant ensemble. Ils partirent et, déroutés, se promenèrent, à lurelure, du boulevard de Montrouge à la chaussée du Maine.

Quatre jours après, Désirée très souffrante dut garder la chambre. Elle avait attrapé un gros rhume à patauger ainsi dans la boue des soirs. Elle avait beau avaler des boules de gomme et des pâtes, s’ingurgiter des tisanes de mauve et des quatre-fleurs, des sirops calmants et des loochs, la toux ne s’en allait point. Elle profita de ce repos forcé pour raccommoder ses frusques et aider sa sœur à bâtir sa robe.

Elle s’ennuyait considérablement, le dimanche surtout. Céline lui tint pourtant compagnie ; son amant était, depuis une huitaine, à la campagne, à l’affût de sites disloqués et dartreux et, elle aussi, voulut profiter de ce contre-temps pour travailler à son costume. Assises près de la fenêtre, elles coupaient, tailladaient, cousaient ; de temps à autre, elles levaient le nez et regardaient au travers des vitres. Un bout de soleil tachait la voie par places et trempait ses rayons pâles dans le ventre des flaques. Les parisiens abusaient de cette éclaircie pour aller encore à la campagne. Les trains de Versailles se succédaient de dix en dix minutes. Les impériales, bondées de monde, chantaient dans le vent qui cinglait le visage des femmes et secouait leurs jupes. Cour-