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pourri le bois. Les poutres font ventre ; il est temps que le charpentier intervienne ; enfin, il m’a promis qu’il serait ici, sans faute, demain, avec ses hommes. C’est égal, je suis content d’être rentré. Dans les rues, tout me tourne, je suis hébété, incertain, ivre ; je n’ai vraiment mes aises que dans mon clocher ou dans cette chambre. — Tiens, soumets-moi cela, ma femme, et il empoigna pour la remuer la salade de céleri, de hareng et de bœuf.

— Quel fumet ! s’écria Durtal, en humant l’odeur incisive du hareng. Ce que ce parfum suggère ! cela m’évoque la vision d’une cheminée à hotte dans laquelle des sarments de genévrier pétillent, en un rez-de-chaussée dont la porte s’ouvre sur un grand port ! Il me semble qu’il y a comme un halo de goudron et d’algues salées autour de ces ors fumés et de ces rouilles sèches. C’est exquis, reprit-il, en goûtant à cette salade.

— On vous en refera, Monsieur Durtal, vous n’êtes pas difficile à régaler, dit la femme de Carhaix.

— Hélas ! fit le mari, en souriant. Il est de corps facile à satisfaire, mais d’âme ! quand je songe à ses désespérants aphorismes de l’autre soir ! Nous prions cependant pour que Dieu l’éclaire. Tiens, dit-il soudain à sa femme, nous invoquerons Saint Nolasque et Saint Théodule que l’on représente toujours avec des cloches. Ils sont un peu de la