Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/232

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

filles. Ou bien, il y a peut-être encore une cause physique, un atermoiement indispensable, une nécessité charnelle de gagner un jour ?

Il chercha d’autres raisons encore, mais il n’en découvrit point.

Au fond, reprit-il, vexé, malgré tout, de son échec, au fond j’ai été un imbécile. J’aurais dû hussarder, ne pas m’arrêter à ses supplications et à ses leurres ; j’aurais dû lui violenter la bouche, lui faire sauter les seins. Ce serait fini, tandis que maintenant tout est à recommencer ; et que diantre, j’ai autre chose à faire !

Qui sait si, à l’heure actuelle, elle ne se fiche pas de moi ? peut-être m’espérait-elle plus virulent et plus hardi ; mais non, sa voix navrée n’était pas feinte, ses pauvres yeux ne simulaient pas l’égarement, et que signifierait alors ce baiser presque respectueux, car il y avait une insaisissable nuance de respect et de gratitude, dans ce baiser qui m’enveloppa la main !

C’est à s’y perdre. En attendant, j’ai, dans cette bousculade, oublié mes rafraîchissements et mon thé. Si j’ôtais mes bottines maintenant que je suis seul, car j’ai les pieds gonflés, à force d’avoir ainsi piétiné dans la chambre.

Si je faisais mieux encore, si je me couchais, car je suis incapable maintenant de travailler ou de lire. Et il ouvrit sa couverture.