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chives des ordres religieux qui existaient à cette époque.

En travaillant ainsi à côté de la Révolution, en sondant ses alentours, l’on exhumerait ses fondements, l’on déterrerait ses causes ; l’on découvrirait certainement qu’à mesure que les couvents s’effondraient, des excès monstrueux prenaient naissance. Qui sait si les folies démoniaques d’un Carrier ou d’un Marat ne concordent point avec la mort d’une abbaye dont la sainteté préservait, depuis des années, la France ?

— Pour être juste, répondit l’abbé, il convient de dire que la Révolution n’a détruit que des ruines. Le régime de la Commende avait fini par sataniser les monastères. Ce sont eux, hélas ! qui, par le relâchement de leurs mœurs, ont fait pencher la balance et attiré sur ce pays la foudre.

La Terreur n’a été qu’une conséquence de leur impiété. Dieu, que rien ne retenait plus, a laissé faire.

— Oui, mais comment convaincre maintenant de la nécessité des compensations un monde qui divague dans des accès continus de gain ; comment le persuader qu’il serait urgent, pour conjurer de nouvelles crises, d’abriter les villes derrière les redoutes sacrées des cloîtres ?

Après le siège de 1870, prudemment, l’on enveloppa Paris dans un immense réseau d’infranchissables forts ; mais ne serait-il pas indispensable aussi de l’entourer d’une ceinture de prières, de bastionner ses alentours de maisons conventuelles, d’édifier, partout, dans sa banlieue, des monastères de Clarisses, de Carmélites, de Bénédictines du Saint-Sacrement, des monastères qui seraient, en quelque sorte, de puissantes citadelles destinées à arrêter la marche en avant des armées du mal ?