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L’année liturgique n’était-elle pas, comme elle, pavée de cristaux et de cabochons par ses admirables cantiques, par ses ferventes hymnes, sertis dans l’or même des Saluts et des Vêpres ?

Il semblait que l’Eglise eût substitué à cette couronne d’épines dont les Juifs avaient ceint les tempes du Sauveur, la couronne vraiment royale du Propre du Temps, la seule qui fût ciselée dans un métal assez précieux, avec un art assez pur, pour oser se poser sur le front d’un Dieu !

Et la grande Lapidaire avait commencé son œuvre en incrustant, dans ce diadème d’offices, l’hymne de saint Ambroise, et l’invocation tirée de l’Ancien Testament, le « Rorate cœli », ce chant mélancolique de l’attente et du regret, cette gemme fumeuse, violacée, dont l’eau s’éclaire alors qu’après chacune de ses strophes surgit la déprécation solennelle des patriarches appelant la présence tant espérée du Christ.

Et les quatre dimanches de l’Avent disparaissaient avec les pages tournées de l’eucologe ; la nuit de la Nativité était venue : après le « Jesu Redemptor » des Vêpres, le vieux chant Portugais, l’« Adeste fideles », s’élevait, au Salut, de toutes les bouches. C’était une prose d’une naïveté vraiment charmante, une ancienne image où défilaient les pâtres et les rois, sur un air populaire approprié aux grandes marches, apte à 1 charmer, à aider, par le rythme en quelque sorte militaire des pas, les longues étapes des fidèles quittant leurs chaumières pour se rendre aux églises éloignées des bourgs.

Et, imperceptiblement, ainsi que l’année, en une invisible rotation, le cercle virait, s’arrêtait à la fête des