Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/324

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tement l’adorer ainsi que le font, ici, les moines. Ah ! pouvoir se taire, se taire à soi-même, en voilà une grâce !

Il arriva au réfectoire ; il y était, d’habitude, seul, M. Bruno n’assistant jamais, le matin, au repas de sept heures. Il commençait à se tailler une miche, quand le P. hôtelier parut.

Il tenait un pavé de grès et des couteaux. Il sourit à Durtal et lui dit : je vais faire reluire les lames du monastère, car elles en ont vraiment besoin ; — et il les déposa sur une table, dans une petite pièce qui attenait au réfectoire.

— Eh bien ! êtes-vous content ? fit-il, en revenant.

— Certainement — mais, que s’est-il passé, ce matin, comment ai-je été communié par l’abbé de la Trappe, alors que je devais l’être par ce vicaire qui dîne avec moi ?

— Ah ! s’écria le moine, j’ai été aussi surpris que vous. Le père abbé a subitement, en se réveillant, déclaré qu’il lui fallait, ce matin, célébrer sa messe. Il s’est levé, malgré les observations du prieur qui, en tant que médecin, lui défendait de quitter son lit. Je ne sais pas et personne ne sait ce qui l’a pris. Toujours est-il qu’on lui a alors annoncé qu’il y aurait un retraitant à communier et il a répondu : parfaitement, c’est moi qui le communierai. M. Bruno en a, du reste, profité pour s’approcher, lui aussi, du Sacrement, car il aime à recevoir Notre-Seigneur des mains de Dom Anselme.

Et cette combinaison a aussi satisfait le vicaire, poursuivit, en souriant, le moine ; car il est parti de la Trappe de meilleure heure, ce matin, et il a pu dire sa messe dans une commune où il était attendu… À propos, il m’a