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de vieux airs du XVIIe siècle, puis tournant brusquement à un coude, en une mélodie d’orgue de barbarie, en une mélodie moderne, presque canaille.

Et il était quand même captivant ce salmis biscornu de sons ! Après le Kyrie eleison et les invocations du début, la Vierge entrait en scène comme une ballerine sur une mesure de danse, mais lorsque défilaient certaines de ses qualités, lorsque s’annonçaient certains de ses symboles, la musique devenait singulièrement respectueuse ; elle se ralentissait, s’attardait, solennelle, répétant, par trois fois, sur le même motif, quelques-uns de ses attributs, le « Refugium Peccatorum » entre autres, puis elle reprenait sa marche, et recommençait ses grâces en sautillant.

Et quand la chance voulait qu’il n’y eût point de sermon, le Salut avait lieu aussitôt après.

On y célébrait, avec des raclures de maîtrise, avec une basse catarrhale et un ou deux enfants qui reniflaient, les chants liturgiques : « l’Inviolata », cette prose languissante et plaintive, à la mélodie blanche et traînée, si convalescente, si débile qu’elle semblerait ne devoir être chantée que par des voix d’hospices, puis le « Parce Domine », cette antienne si suppliante et si triste, enfin ce morceau détaché du « Pange lingua », le « Tantum ergo », humble et réfléchi, admiratif et lent.

Quand l’orgue plaquait ses premiers accords, quand cette mélodie de plain-chant commençait, la maîtrise n’avait plus qu’à se croiser les bras et à se taire. Ainsi que ces cierges que l’on allume par des fils de fulminate reliés entre eux, les fidèles prenaient feu et, conduits par l’orgue, ils entonnaient eux-mêmes l’humble et le glo-